Fiche de révision Olympe de Gouges, *Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne* (1791) - Préambule

INTRODUCTION

  • Présentation de l’auteur et du contexte : Olympe de Gouges est une femme de lettres et femme politique de la fin du XVIIIe siècle, considérée comme l’une des pionnières du féminisme. En 1791, en pleine Révolution française, elle publie la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne. Ce texte est une réécriture critique et engagée de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, dont elle dénonce l’oubli des femmes.

  • Situation de l’extrait : Ce texte est le Préambule de la Déclaration. Comme tout préambule, il précède les articles de loi et sert à en exposer les motifs, les justifications et les buts. Il s’agit d’un texte fondamental qui établit la légitimité de toute la démarche d’Olympe de Gouges.

  • (Lecture expressive de l’extrait)

  • Problématique / Projet de lecture : On se demandera comment Olympe de Gouges, à travers ce préambule, utilise la stratégie de la réécriture pour affirmer avec force la légitimité et la nécessité de la reconnaissance des droits politiques des femmes.

  • Annonce du plan (mouvements du texte) :

    1. Premier mouvement (lignes 1 à 2) : L’auto-proclamation des femmes en tant que force politique légitime.
    2. Deuxième mouvement (lignes 3 à 13) : Une argumentation juridique et philosophique qui expose les causes et les buts de la Déclaration.
    3. Troisième mouvement (lignes 14 à 17) : L’acte solennel de la déclaration, qui met en scène les femmes comme actrices de leur propre émancipation.

DÉVELOPPEMENT : EXPLICATION LINÉAIRE

1er Mouvement : L’auto-proclamation des femmes en force politique (l. 1-2)
  • Idée directrice : Gouges commence par un acte de langage fort : elle constitue les femmes en une entité politique représentative de la Nation.
  • Développement des arguments et justifications :
    • L’énumération initiale “Les mères, les filles, les sœurs” (l. 1) ancre la revendication politique dans une réalité familiale et naturelle. Cela crée une image universelle de la femme et suggère que la Nation entière est concernée.
    • Elles s’autoproclament “représentantes de la nation” (l. 1). En reprenant ce titre officiel, elles s’approprient une légitimité politique qui leur est refusée.
    • La demande d’être “constituées en Assemblée nationale” (l. 2) est audacieuse. Elle ne demande pas une place dans l’Assemblée existante, mais la création d’une assemblée féminine souveraine. C’est un geste fondateur.
2ème Mouvement : La justification philosophique et juridique (l. 3-13)
  • Idée directrice : Dans une longue et unique phrase, Gouges imite le style juridique de 1789 pour démontrer la nécessité de sa Déclaration, en pointant les causes des maux de la société et les objectifs de son texte.
  • Développement des arguments et justifications :
    • Le texte débute par le gérondif “Considérant que…” (l. 3), un calque direct du langage constitutionnel qui confère une grande solennité et une autorité juridique au propos.
    • Elle identifie les causes du malheur public par une gradation : “l’ignorance, l’oubli ou le mépris des droits de la femme” (l. 3). Elle accuse ainsi la société d’une triple faute, de la négligence à l’hostilité active.
    • Elle établit un lien de cause à effet direct entre l’oppression des femmes et la crise politique générale : “les seules causes des malheurs publics et de la corruption des gouvernements” (l. 4-5). Le problème des femmes devient la clé des problèmes de la Nation.
    • La Déclaration a plusieurs buts, introduits par la locution “afin que” :
      • Servir de “rappel” constant des “droits et devoirs” pour tout le “corps social” (l. 7-8).
      • Permettre une comparaison entre “les actes du pouvoir des femmes, et ceux du pouvoir des hommes” (l. 8-9), introduisant l’idée d’un nécessaire équilibre des pouvoirs entre les sexes, absente de la déclaration de 1789.
      • Assurer le “bonheur de tous” (l. 13). Le projet n’est pas catégoriel mais universel ; le bonheur des femmes est la condition du bonheur commun.
3ème Mouvement : L’acte solennel de la Déclaration (l. 14-17)
  • Idée directrice : Le texte se clôt sur un moment performatif : les femmes, se posant en sujet de l’Histoire, proclament elles-mêmes leurs droits.
  • Développement des arguments et justifications :
    • La locution “En conséquence” (l. 14) présente la déclaration comme l’aboutissement logique de l’argumentation précédente.
    • L’expression provocatrice “le sexe supérieur, en beauté comme en courage, dans les souffrances maternelles” (l. 14-15) retourne le stigmate. Elle revendique une supériorité morale fondée sur des qualités féminines (beauté, maternité) mais aussi masculines (courage), se réappropriant les stéréotypes pour les sublimer.
    • Les verbes “reconnaît et déclare” (l. 15) sont des verbes performatifs : en les prononçant, l’acte est accompli. Les femmes ne demandent plus, elles affirment.
    • La mention de “l’Être suprême” (l. 16) est une autre reprise directe de la Déclaration de 1789. Elle place son texte sous la plus haute autorité spirituelle et philosophique, le rendant aussi sacré et légitime que le texte masculin.

QUESTION DE GRAMMAIRE POSSIBLE

Question : “Analysez la proposition subordonnée introduite par ‘Considérant que’ à la ligne 3.”

Réponse : Il s’agit d’une proposition subordonnée participiale, dont le noyau est le participe présent “Considérant”. Elle est employée ici comme une proposition circonstancielle de cause. Elle exprime la raison pour laquelle les femmes (“les mères, les filles, les sœurs…”) ont pris la décision énoncée dans la proposition principale qui suit (“ont résolu d’exposer…”). Cette construction, typique du langage juridique, permet d’exposer les motifs d’une décision avant la décision elle-même, donnant ainsi une grande force logique à l’ensemble de la phrase.


CONCLUSION

  • Bilan de l’analyse : Ce préambule est une démonstration magistrale de stratégie argumentative. En imitant la forme, le lexique et la solennité de la Déclaration de 1789, Olympe de Gouges met en lumière l’injustice de l’exclusion des femmes et confère à sa propre déclaration une légitimité égale. C’est un acte de combat politique qui utilise la langue comme une arme pour revendiquer une place sur la scène de l’Histoire.

  • Ouverture justifiée (lien avec le parcours “Écrire et combattre pour l’égalité”) : Ce texte est emblématique du parcours “Écrire et combattre pour l’égalité”. En se réappropriant l’outil même de la loi, Olympe de Gouges montre que le combat pour l’égalité passe par la maîtrise et le détournement du discours dominant. Son geste annonce les grandes luttes féministes à venir, des suffragettes du début du XXe siècle aux débats contemporains sur la parité et l’écriture inclusive. Il illustre parfaitement que l’écriture peut être une arme de combat pour transformer la société.

Written on June 26, 2025